Le portrait de Luc Brunschwig par Luc Brunchswig
Si le neuvième art est un bar, Luc Brunschwig y est entré en empruntant une allée sombre et un peu inquiétante. Il s’est assis à une table proche de celle où Franck Miller et Alan Moore parlent de leurs faits d’armes. Il commande une boisson mais boit surtout les paroles des deux briscards du comics. Il griffonne alors sur un coin de table défoncée, les prémices Du Pouvoir des Innocents ou de L’Esprit de Warren. S’en suivent alors des récits noirs, politiques, psychologiques tantôt SF, fantasy ou historique, à l’image des Frères Rubinstein. Luc est bien installé à sa table et il reste de la place pour griffonner alors il n’est pas près de sortir de notre bar préféré.
Le portrait chinois de Luc Brunschwig
- Un(e) héros du neuvième art : Daredevil
- Un(e) vilain, méchant, ennemi du neuvième art : Le Caïd (the Kingpin)
- Une œuvre musicale : The Wall de Pink Floyd
- Un instrument de musique : Une batterie
- Une couleur : n'importe quelle couleur mais aquarellée
- Une boisson : Un White Russian
- Un plat : Une paëlla bien épicée
- Un mot : humain
- Une prévision météo : doux mais nuageux en fin de journée
- Un sentiment : La bienveillance
- Un livre : Le Jeune Homme, La Mort et Le Temps de Richard Matheson
- Une catastrophe : Un cataclysme qui ouvre des perspectives
L'anecdote BD de Luc Brunschwig
J'ai écrit plus haut que si je devais être un héros de Bande Dessinée, je serai Daredevil et si j'étais un méchant, je serais son plus grand ennemi, le Caïd... j'en profite du coup pour vous parler de ce qui est aujourd'hui encore ma bande dessinée de référence, celle qui a, à jamais, bouleversé ma vision de lecteur, en m'emmenant vers quelque chose de profondément adulte, mais qui n'en oublie pourtant jamais son rôle distractif ...
Je parle de DAREDEVIL BORN AGAIN (RENAISSANCE) de Frank Miller et David Muzzucchelli qui, au même titre que le Batman - Dark Knight du même Miller ou que l'ensemble de l'œuvre de Alan Moore, a forgé ma façon de voir et d'écrire la Bande Dessinée.
Ce Born Again, c'était une façon nouvelle et profonde de parler de l'humanité des personnages avant de parler de super-héros... ici, Daredevil est le moteur de l'histoire, mais il n'en est pas le sujet... le sujet, c'est clairement Matt Murdock son alter ego aveugle. Le Caïd du crime décide de le mettre à bas, de le priver de son métier, de ses amis, de sa maison... tirant les ficelles dans les coulisses, il parvient en le coupant de tout ce qui est sa vie, à transformer un homme en une coquille vide qui n'aspire plus qu'à mourir. Jusqu'à ce que...
Le plan est diabolique d'autant que si nous, nous savons qui se cache derrière la déchéance de Murdock, lui en reste très longtemps inconscient, croyant d'une certaine façon payer pour tout ce qu'a été sa vie, les gens qu'il n'a pas su aimer, les heures passées à combattre le crime plutôt qu'à se faire une place dans le quotidien.
L'écriture est sublime. Les pensées en textes off sont nombreuses, mais elles ont une vraie force, ce qui n'est pas toujours vrai pour ce type de narration. Chaque mot est une lame de rasoir qui vide Matt Murdock de son sang et nous fait sentir la vie qui lentement s'échappe de la blessure béante qu'il est devenu.
Si les couleurs sont hideuses et datés, le dessin de Mazuccheli reste aujourd'hui encore une référence, tant l'homme adopte une narration parfaite pour accompagner la déchéance de Murdock (la scène de la ruelle, vue en plongée, entrecoupée de souvenirs, alors que Murdock dort, roulé en boule, près d'un clochard, m'a marqué à jamais). Sa capacité aussi à transformer son dessin, à abandonner temporairement le réalisme pur pour se couler dans un style plus impressionniste est d'une parfaite justesse.
Un récit puissant, deux grands auteurs qui le subliment. Une référence incontournable.